Attention et état méditatif - Krishnamurti

Christine LE FOURN-TANGUY Par Le 13/03/2018

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Jiddu Krishnamurti (1895-1986), Philosophe et sage Indien, définit l'attention dans son ouvrage "Le sens du bonheur".

L'état méditatif (il ne s'agit pas de la méditation formelle que Krishnamurti n'encourageait pas) se caractérise par l'état de présence sans effort. Dans les passages ci-dessous, il distingue cet état de conscience de la concentration qui réclame un effort et de l'absorption dans laquelle on peut être pris quand un sujet nous captive. Trois manières différentes de prêter attention.

"L’attention qui est généralement conseillée, pratiquée, ou privilégiée, consiste à rétrécir l’esprit aux dimensions d’un point, ce qui est un processus d’exclusion. Quand vous faites un effort pour être attentif, vous résistez généralement à quelque chose – au désir de jeter un coup d’œil par la fenêtre, ou de regarder qui entre dans la pièce, et ainsi de suite. Une partie de votre énergie se dissipe déjà dans cette résistance. Vous emmurez votre esprit pour le forcer à se concentrer totalement sur un objet particulier, et vous appeler cela discipliner l’esprit pour le rendre attentif. Vous essayez d’exclure de votre esprit toute pensée, à l’exception de la seule et unique sur laquelle vous voulez qu’il se rencontre pleinement. Voilà ce que signifie pour la plupart des gens « prêter attention ».

Mais, je crois qu’il existe un type d’attention différent, un état d’esprit qui n’est pas exclusif, qui n’est fermé à rien ; et parce que aucune résistance ne s’exerce, l’esprit est alors capable d’une attention beaucoup plus grande. Mais l’attention sans résistance est distincte de l’attention par absorption.

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Quand vous voulez vous concentrer sur quelque chose et que votre esprit vagabonde, c’est ce vagabondage qu’on appelle la distraction ; alors une petite partie de votre esprit résiste à ce phénomène nommé distraction, et cette résistance est une perte d’énergie. Alors que si vous êtes conscient de chaque mouvement de l’esprit, d’instant en instant, la distraction n’existe à aucun moment et l’énergie de l’esprit n’est pas gaspillée sous forme de résistance. D’où l’importance de savoir ce qu’est réellement l’attention.

Si vous écoutez à la fois le son de la cloche et le silence entre ses tintements, c’est cette écoute qui constitue l’attention. De la même manière lorsque quelqu’un parle, l’attention consiste à tendre l’esprit non seulement vers les paroles prononcées, mais aussi vers le silence entre les mots.

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Soit nous nous efforçons de discipliner l’esprit de manière si stricte qu’il ne peut plus dévier, soit nous le laissons vagabonder et sauter d’un sujet à l’autre. Or ce que je décris n’est pas un compromis entre ces deux états, mais au contraire quelque chose qui n’a rien à voir ni avec l’un ni avec l’autre. C’est une approche radicalement différente consistant à être totalement conscient, de sorte que votre esprit est attentif en permanence sans être enfermé dans le processus d’exclusion.

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S’il n’est pas trop encombré, ni continuellement occupé, il peut alors écouter ce chien qui aboie, le train qui passe au loin sur le pont, tout en étant pleinement conscient de ce que dit ici et maintenant une personne qui s’adresse à vous. Alors l’esprit n’est pas une chose morte, il est vivant."